Hausse d'impôt Biden, inévitable ? Mais est-ce que cela nous sauvera des déséquilibres budgétaires accumulés ?
Inévitable, le manque de discipline budgétaire mène forcément à des impôts plus élevés...
Alors, cette fois, c'est différent ?
Compte tenu de l'ampleur des déficits en cours et des excès de dettes, il serait illusoire de croire qu'augmenter les impôts permettrait de remettre en ordre les équilibres budgétaires... Par contre cela fait bon effet pour le marketing politique et le maintien de l'ordre social (lutte contre les inégalités, etc...).
La seule possibilité à court/moyen terme pour financer les déficits qui se creusent, est de faire encore plus de tout ce qui nous a amené à cette situation : plus de dettes, plus d'ingénierie financière, toujours plus. Car nous sommes rentrés dans une période exceptionnelle d'engrenage et d'accroissement inévitable des dettes.
En rouge le taux marginal d'imposition US, en blanc la dette publique américaine en % du PIB :
Rappel - stimulus monétaire et budgétaire de plus de 12 000 milliards de dollars entre février 2020 et mars 2021 rien qu'aux USA :
Rappel - Déficit US. Il manque un peu d'argent :
Donc on fait de la dette :
Les valorisations des marchés actions vont-elles se normaliser avec la hausse des bénéfices ?
Des évaluations records sur des marges bénéficiaires record :
« Les marges bénéficiaires sont probablement la série qui revient le plus à la moyenne dans le monde de la finance, et si les marges bénéficiaires ne reviennent pas à la moyenne, alors quelque chose a mal tourné avec le capitalisme. » - Jeremy Grantham
Les marges bénéficiaires des entreprises (bleu clair) ont dépassé les niveaux pré-covid et ne sont pas loin des niveaux records de 11,8%. La ligne bleue foncée (8.5 %) est la moyenne :
Je vous laisse réfléchir sur ce graphique, et le mettre en face des niveaux de valorisation records sur l'ensemble des indices. Par valorisation, on peut parler vulgairement de ratio cours / bénéfices. On entend souvent que les ratios cours bénéfices sont élevés car les bénéfices sont faibles, et que quand ceux-ci augmenteront, les ratios cours/bénéfices se normaliseront. Le graphique ci-dessus nous montre clairement que les marges bénéficiaires sont déjà revenues à des niveaux élevés.
Rappel du niveau du ratio cours / bénéfice ajusté :
Nous avons donc bien des évaluations records sur des marges bénéficiaires record.
En rapport cours par rapport aux chiffres d'affaires, ce n'est pas mieux :
Inflation juste transitoire, c'est sûr ?
Le consensus table sur une inflation transitoire. Difficile d'y voir clair car beaucoup de choses contradictoires ont été publiées. Ci-après, une salve de graphiques en faveur d'une forte reprise de l'inflation :
Bonne corrélation entre les prix à la production en vert, et l'indice des prix de la FED du Kansas en orange :
Nordea : "La FED et le consensus sur une inflation transitoire pourraient avoir tort. La hausse des prix à a consommation depuis un an devrait aller plus haut et plus longtemps. Et le marché du travail devient plus tendu."
Graphique 1 : prix à la consommation bleu clair VS indice des prix des voitures d'occasion en bleu foncé (en avance de 3 mois).
Graphique 2 : Indice des prix des loyers en bleu clair VS indicateur tenant compte des anticipations d'inflation, du taux de vacance, des prix immobiliers et des données sur les propriétaires recouvrant les loyers en bleu foncé.
Graphique 3 : Prix à la consommation en bleu clair et indicateur avancé des sociétés NFIB (en avance de 6 mois) en bleu foncé.
Graphique 4 : Taux de chômage US en bleu clair VS indicateur avancé des sociétés NFIB des ouvertures de postes (en avance de 6 mois).
Coût unitaire de main-d'œuvre non agricole en bleu clair (en avance de 2 trimestres), indice des prix à la consommation en bleu foncé :
Indice des prix alimentaires CRB :
Le coût d'expédition des conteneurs depuis la Chine vers le reste du monde ne montre aucun signe d'assouplissement, les prix étant encore 3 à 5 fois supérieurs à la moyenne à long terme :
Certaines banques centrales commencent à préparer les esprits pour des hausses de taux directeurs, et pas seulement dans les émergents :
The Daily Shot : La Banque du Canada a pris un ton hawkish (en faveur d’une remontée de taux), divergeant de la Fed.
Alors, sommes-nous dans la m**** ?
L'argument qu'il faudrait maintenir les taux bas pour favoriser l'investissement... Quand on regarde les CAPEX (dépenses d'investissement), on voit bien qu'au cours de ces dernières années les politiques monétaires n'ont pas honoré les promesses. Toutes ces facilités monétaires et ces taux bas ne sont pas allés vers les dépenses d'investissement. L'argent est allé spéculer sur les marchés financiers (cf. graphs de valorisation plus haut), les sociétés ont pratiqué l'ingénierie financière et ont préféré racheter leurs propres actions plutôt qu'investir dans leur outil professionnel :
On ne fait pas boire un âne qui n'a pas soif ! Principale raison des baisses de dépenses d'investissement : "pas besoin d'augmenter les capacités" :
Les banques centrales et les autorités le savent bien, l'argent gratuit, les QE, les politiques monétaires souples, c'est pour préserver la stabilité financière et éviter la catastrophe en chaîne. Les chiffres montrent bien que l'investissement dans l'outil productif (principal moteur de la croissance) est en déclin, donc ce n'est pas l'objet des politiques monétaires accommodantes.
Si les taux remontent au delà d'un certain seuil (que personne ne connaît), c'est le défaut généralisé. Voilà la vraie raison des politiques monétaires d'argent facile et de taux bas.
Maintenant faites le lien entre tous les graphiques de cet article. C'est effrayant, nous sommes dans un corner. Des valorisations au plus haut, conséquences de taux bas, mais maintenant que des excès majeurs ont été accumulés, on voit l'inflation revenir. Sans même parler du risque de stagflation, avec une croissance qui ne reprendrait pas durablement et vigoureusement à hauteur de l'inflation générée. N'oublions pas que les dépenses d'investissement continuent de baisser, et les autres forces structurellement déflationnistes sont toujours à l'œuvre (croissance démographique, innovation technologique, pression à la réduction des coûts, pressions liées à l'endettement).
Il va falloir créer encore plus de dettes pour financer la relance et continuer de refinancer les anciennes dettes, alors qu'on a déjà usé la meilleure période, les 50 années de baisses continuelles de taux ayant facilité l'endettement, avec l'apothéose sur ces tous derniers mois. Mais si l'inflation est de retour, alors comment refinancer les massives dettes passées et celles à venir ?
Oui le système a besoin d'inflation, en théorie pour apurer les dettes passées. Mais n'oubliez pas que le monde ne tourne pas autour de nous, simples particuliers français, endettés à taux fixes pour notre immobilier. Le reste du système vit du crédit à taux variable et doit se refinancer régulièrement (états, sociétés, produits financiers exotiques type CLO) et peut très difficilement supporter le moment critique où les taux se mettraient à remonter, compte tenu des excès d'endettement et du levier. Ce point a été développé dans des précédents articles.
Que faire maintenant qu'on est à taux zéro et même en négatif, avec une inflation qui semble revenir et qui constituerait une force importante en faveur d'une remontée des taux ?
Eh bien on essaie de jouer les prolongations avec des grands plans d'aides publiques, sur l'écologie, les infrastructures... Tout cela financé par plus de dettes bien sûr (mais bon, cette fois c'est pour la bonne cause hein, et pour l'efficacité, on verra bien). En attendant de pouvoir faire plus de répression financière et pratiquer des taux réels largement plus négatifs.
Mais pour l'instant pas de problème, nous verrons demain. YOLO. L'indice de volatilité VIX a baissé tandis que le S&P a touché de nouveaux plus hauts cette année :
Andy BUSSAGLIA est conseiller en gestion de patrimoine depuis plus de 10 ans.
Il est associé-gérant du cabinet Family Patrimoine à Meylan, près de Grenoble.
Lien vers son parcours
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