Toutes les classes d'actifs progressent en même temps en dépit des risques qui s'accumulent.
Le monde financier est-il devenu fou et incontrôlable ? Ou, au contraire, tout reste-t-il sous contrôle de nos éminents banquiers centraux ? Après tout, ce sont eux qui contrôlent les taux courts (et indirectement les taux longs), et qui ajustent la taille de leur colossal bilan via achats sur les marchés financiers. Ce faisant, ils modifient l'échelle de prix de l'ensemble des actifs.
Dans le cadre de marchés fonctionnant normalement, les valeurs refuges (or, dollar et autres devises refuges, bons du trésor US / bund...) et les actifs risqués (actions, crédit high yield ou junk, dette périphérique...) sont des vases communicants. Ils évoluent en théorie à l'inverse l'un de l'autre.
En ce moment, les valeurs refuges et les actifs risqués montent de concert car les investisseurs cherchent à se couvrir face aux risques qui s'accumulent, tout en se disant qu'ils bénéficient d'un filet de sécurité sur les actifs risqués puisque les banquiers centraux interviendraient en cas de grain de sable dans l'engrenage.
A côté de cela, les marchés ont connu une forte progression en 2019 et reviennent actuellement sur leurs plus haut. Derrière cette hausse, regardons de plus près le marché américain, qui constitue le "marché directeur". Six titres : Microsoft, Apple, Google, Amazon, AMD et Verisign représentent 75 % de la performance du S&P et du Nasdaq 100. Est-ce un marché sain ? Merci à la mécanisation des marchés et à la gestion passive.
Que dit la macro-économie ?
La production industrielle en Allemagne pointe vers le sud,
Les dépenses d'investissement US également,
Ralentissement de l'économie chinoise,
Risque politique, montée des mécontentements partout sur la planète,
De nombreux indicateurs macro économiques sont mitigés, même si pour certains nous assistons à des signaux de stabilisation.
Tout cela, bien avant la prise en compte des effets du coronavirus.
D'ailleurs, la croissance attendue des bénéfices en Europe (et donc largement intégrée dans les cours) est de 9 %, mais c'était également avant prise en compte des effets du coronavirus.
Cependant, avec les innovations monétaires des banques centrales, la communauté spéculative a pris l'habitude d'appliquer le proverbe "bad news is good news". Les mauvaises nouvelles peuvent avoir vocation à faire progresser les actifs risqués, puisque la communauté spéculative anticipe une mise à disposition supplémentaire de liquidités de la part des banques centrales.
En dépit du risque, acheter des actifs risqués s'est révélé être une stratégie payante au cours des derniers mois. Et cela va peut-être continuer étant donné qu'en dépit de ce que l'on peut lire et entendre ici et là, les banques centrales ont encore des marges de manœuvre. La BCE ou la FED pourraient acheter directement des actions, comme le fait la BOJ. Les taux US pourraient être abaissés. Le budgétaire pourrait à terme renforcer les politiques monétaires (green new deal, helicopter money, grands plans d'infrastructures financés avec l'argent "gratuit" des banques centrales). La BCE pourrait alléger les contraintes réglementaires sur les banques comme en Chine (dans ce cas, il faudra penser à initier une position sur les bancaires qui ne se paient pas très cher, même si tout est relatif et qu'il est extrêmement difficile d'évaluer la "juste valeur" des bancaires).
Ceci étant dit, quels extrêmes en terme de valorisation peut-on atteindre sur les marchés actions ? La valeur d'une action se constate traditionnellement par son bénéfice comparé au cours d'achat. Le ratio correspondant est le PER (price earning ratio). Sur le S&P 500, on achète en moyenne les actions actuellement 19 fois leurs bénéfices. La moyenne historique est de 13.5. Ajusté du cycle (méthode Shiller), on est même à 30 fois actuellement.
Ces PER élevés contiennent en soi une "promesse" de "délivrer" des bénéfices à terme. Pour justifier ces niveaux de valorisation, il va falloir à un moment donné que :
- Les bénéfices augmentent fortement dans le cadre d'un simple retour vers la moyenne des PER. L'augmentation des bénéfices peut-être de deux ordres : amélioration de l'activité économique, ou "simple" phénomène d'inflation sur la monnaie, auquel cas les cours élevés préfigurent un réveil significatif de l'inflation. Mais nous n'en sommes pas encore là même si c'est une évidence à long terme (nous y reviendrons).
- Ou alors il va falloir que les cours se réajustent à la baisse...
Les banquiers centraux aimeraient bien que les valorisations ne progressent plus, et restent sur un plateau. C'est le scénario "idéal". Mais la communauté spéculative ne semble pas être du même avis, et entend profiter de la promesse de protection.
Il faut bien entendu aller dans le détail car au delà de ces moyennes de PER, des écarts sectoriels et même intra-secteurs laissent entrevoir d'intéressantes opportunités de se positionner à bon prix.
Les actifs risqués recèlent en ce sens un certain potentiel, mais il faut disposer de moyens sophistiqués pour gagner de l'argent sur ces marchés.
En parallèle, je vois actuellement, mais ce n'est pas nouveau, un bien meilleur moyen de bénéficier des largesses des banques centrales.
Bien qu'éclipsés par un marché d’actions en pleine effervescence, les métaux précieux et les actions minières aurifères ont enregistré de belles performances en 2019 (en hausse de 43,49 %).
Les performances ont été bonnes depuis les avis écrits sur ce blog en 2018, puisque cette classe d'actifs progresse de 38 % à 61 % selon le timing d'investissement. Mais le potentiel est loin d'être épuisé, et ce pour plusieurs raisons :
- Le secteur des minières aurifères s'est considérablement assaini (solidité financière des bilans accrue).
- Pourtant, l'exposition de la communauté spéculative aux titres aurifères est proche de son niveau le plus bas depuis plusieurs décennies. La classe d'actifs semble n'intéresser personne. C'est un point très attractif puisque s'il y a un marché haussier sur cette classe d'actifs, nous n'en serions qu'au tout début. Bien se rappeler que l'ensemble des actifs financiers et immobiliers se paient extrêmement chers aujourd'hui. Les endroits où il n'y a personne et qui recèlent une valeur intrinsèque intéressante sont rares. L'effet de base est considérable.
- L'or est une valeur refuge qui peut progresser en période troublée. Les minières aurifères sont largement corrélées à l'évolution de la valeur de l'or. Intéressant en cas de correction des marchés des actifs risqués.
- En cas de reprise de l'inflation, et dans un contexte où les banques centrales seraient tétanisées par les risques d'une remontée de taux sur la stabilité financière, l'or en profiterait de manière massive. Attention, en cas de remontée d'inflation et de tentative de remontée de taux, il peut y avoir une période intercalaire désagréable pour l'or.
- Surtout, si l'on raisonne dans le cadre analytique qui consiste à penser que nous sommes allés très loin dans les politiques monétaires, et que nous ne pourrons plus revenir en arrière en raison du poids de l'endettement, de la financiarisation, des leviers, des dérivés, et plus globalement des promesses contenues dans le système ("les banques centrales seront toujours là, continuez de prendre du risque") : l'or est inversement corrélé aux taux. L'or peut permettre de gagner beaucoup d'argent dans un univers de taux négatifs et de nouvelles innovations monétaires que nous connaîtrons probablement dans un avenir plus ou moins proche.
- D'ailleurs, ces innovations ont commencé, nous sommes dans leur prolongement. La FED est massivement intervenue ces dernières semaines, notamment sur le marché des repos. Elle a injecté près de 450 milliards de dollars en 5 mois. La Chine a injecté 300 milliards d'équivalents dollars dans son système en seulement quelques jours.
Pour terminer sur la classe d'actifs des mines d'or, ne pas oublier qu'il s'agit d'une thématique très volatile et qu'il faut disposer d'un horizon d'investissement assez long pour permettre d'absorber d'éventuelles baisses de valeur intermédiaires.
D'autres thématiques d'investissement recèlent un potentiel de performance et/ou de résilience intéressant. La configuration de marché actuelle a créé des distorsions qui peuvent être mises à profit dans les portefeuilles.
Plus que jamais, la sélectivité et la flexibilité seront les maîtres mots sur les marchés en 2020. Sur le marché des actifs financiers, et plus particulièrement sur les actifs risqués (actions, high yield, dette périphérique...), il faudra être plus réactif que les autres pour sortir de la vague dès les premiers signaux de difficultés.
Lors d'un prochain article, nous étudierons les moyens de sécuriser une allocation exposée au risque dans le contexte de l'assurance-vie française ou luxembourgeoise :
- Restriction de l'accès au fonds en euros garanti en capital (mais pas contre une reprise de l'inflation) ;
- Des taux négatifs sur les fonds monétaires d'attente.
Dès lors, sur quels supports arbitrer pour sécuriser temporairement son allocation ?
Nous le verrons prochainement.
Andy BUSSAGLIA
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Nous vous rappelons que les unités de comptes présentent un risque pour l'épargnant : en cas de baisse des marchés, la valeur du contrat peut, selon les supports choisis, également baisser ; l'épargnant peut retrouver un capital global inférieur à l'épargne versée.